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mercredi 15 mai 2013

Histoire du Morane Saulnier 733 Alcyon C/N 67

Bonjour,

Aujourd'hui je vais vous parler d'un avion dont je ne parle pas beaucoup habituellement mais comme tout avion, dès qu'on creuse un peu, ça devient intéressant, voici l'histoire du Morane Saulnier 733 Alcyon:

A la fin de la deuxième guerre mondiale, l'armée de l'air comme la marine avaient besoin d'un avion d'entrainement moderne destiné à la formation de base. C'est ainsi qu'en 1949 un marché d'état est passé pour répondre a cette demande commune des deux armée.


Logo
Pour répondre à cette offre, la firme Morane Saulnier est sur les rangs, elle a déjà fournie l'armée de l'air en avion d'entrainement depuis de longue années notamment avec la série des MS 230, 315, 317 avant guerre puis le MS 472 Vanneau biplace d'entrainement à la chasse qui a volé en décembre 1945 et a été commandé à 233 exemplaires est son premier succès d'après guerre. L'entreprise compte bien conserver ce savoir faire et reconquérir les marchés qu'elle a perdue.

Morane Saulnier
Le Morane Saulnier 230, construit à 1100 exemplaires dans les années 20


Morane Saulnier
Le MS 472, 1er succès de l'après guerre pour Morane Saulnier





Afin de remporter l'appel d'offre de l'armée; le  1er prototype développé par la firme est le Morane Saulnier 730 qui vole le 11 aout 1949. Il n'est construit qu'a un seul exemplaire mais a déjà l'allure d'un Morane 733 Alcyon. Cependant il a des différences:

  • Moteur Mathis 8G.20 inversé V8 de 180 chevaux
  • trains d’atterrissage fixes
Le MS 730-01 immatriculé F-WFOB
moteur
L'Argus As 10

Cependant, il ne répond pas au cahier des charges fixés par l'état notemment à cause de son moteur jugé pas assez puissant, le mathis est donc rapidement remplacé par un Argus As-10 de 240ch ( pratique car déjà utilisé sur un appareil produit en série, le MS-500 (le Storch francisé)). L'appareil ainsi remotorisé vole en novembre 1949 sous l'appelation MS-731 cependant, lui non plus ne sera pas produit en série (peut-être parce que l'Argus As-10 n'est pas disponible en quantité suffisante (c'est un moteur d'origine allemande dont la conception remonte à la fin des années 20).
Une autre version dotée d'un Argus Salmson 8 de 250cv (toujours à train d’atterrissage fixe) vole aussi.






Une dernière version est développée (cette fois ce sera la bonne) en 1951, le moteur allemand Argus est remplacé par un Potez français de la même puissance, le Potez 6D.30, par ailleurs, l'appareil est équipé d'un train d'atterrissage rentrant afin de donner à l'appareil une meilleur aérodynamique (et surement également pour donner à l'appareil des caractéristiques plus proches des appareils que l'élève aura à piloter ensuite).


moteur avion
Le Potez 6D 30

C'est ainsi que le 16 avril 1951, il y a maintenant 62 ans, le désormais nommé MS 733 fait son premier vol. Il est suivi de 5 avions de pré-production puis 200 avions de série réalisés dans l'usine de Puteaux. Les appareils sont répartis ainsi:
  • 40 pour l'aéronavale française
  • 15 pour le Cambodge
  • 145 pour l'armée de l'air (dont 70 équipés de mitrailleuses).

chaîne de fabrication Puteaux
La chaîne de production en 1957. Il s'agit des appareils de l'aéronavale donc la fin de série.

En 1952, l'appareil entre en service dans l'armée de l'air. C'est un succès pour Morane Saulnier puisque ses qualité de vol sont reconnues.

En juin 1955, c'est au tour du Cambodge d'être équipé du nouvel appareil avec l'arrivé des premiers à Saïgon, ils appartient au gouvernement Royal Khmer qui les utilisera au sein de l'école de Phnom-Penh.

Cambodge
Un Ms 733 aux couleurs du Cambodge (celui-ci ne l'a jamais été originellement, on peut le voir à son hélice tripale et à sa discrète immatriculation G-SHOW)

Cambodge
Les MS 733 au Cambodge.


L’Aéronautique navale reçoit ces premiers MS.733 le 17 janvier 1957. Ses 40 appareils sont les 160 à 199 (fin de série). Les livraisons s’étalent jusqu’au début 1958. La première escadrille à en être destinataire est la 51.S et sont totalement opérationnels en octobre 1957. Ils viennent remplacer les Stampes SV-4C retirés du service et les Nord 1002. Ils ont également volés à la 3S (1961 à 1967)à Cuers, la 10S (de 1963 à 1973), la 11S (1962 à 1964) et à la SVS de Lanvéoc (1968 à 1974) date de l'arrivée du MS 880 Rallye, encore un Morane Saulnier qui va battre tous les records de longévité avec quasi 40 ans de service puisqu'il est encore là de nos jours !).

aéronavale 51S
Le MS 733 166, l'un des derniers construit alors qu'il appartenait à l'escadrille 51S (entre 1957 et 1961) à Khourigba
3S Cuers
La 3S à Cuers devant les hangars à dirigeable, témoins d'une époque désormais révolue. Ces hangars ont servis entre autre à abriter le Dixmude, perdu au dessus de la méditerrannée avec tout son équipage le 26 décembre 1923 à cause d'un orage, seul le corps du commandant sera retrouvé. Ces hangars ont été détruits en 1983


10S Saint Raphaël aéronavale
A la 10S entre 1963 et 1973, on voit bien l'hélice bipale qui a toujours équipée les MS 733 de la marine.


SVS
Contrairement à ce que l'on voit sur beaucoup d'avions aujourd'hui préservés (couleur bleue nuit), il semble que tous les appareils de la marine ont portés une livrés à base de couleur aluminium naturel. Il est vu ici en 1977 après son retrait de service de l'aéronavale.


Il se présente sous la forme d'un triplace monomoteur et monoplan aile basse de construction entièrement métallique à train rétractable doté d'une avionique moderne et complète (à l'époque), avec tous les équipements IFR, deux VOR-ILS, un ADF, deux VHF, un horizon artificiel et un gyroscope directionnel.. Son cockpit triplace permet d'avoir côte à côte à l'avant un élève et un instructeur ainsi qu'un autre élève qui peut observer le vol du 1er élève depuis l'arrière et éventuellement prendre sa place ultérieurement. La visibilité à bord de l'avion est très bonne grâce à la verrière coulissante d'une seule pièce. 
Vue de la place arrière.

Tableau de bord du 733
La planche de bord du MS 733 (Photo René Maurines)
Le cockpit parait assez clair et rappel un peu celui du MS 760 Paris.




L'avion permettait de passer les figures de base de la voltige mais uniquement en configuration biplace. L'appareil a été étudié dès l'origine pour la formation des pilotes on retrouve ainsi des patins sous le fuselage destiné aux atterrissage sur le ventre en cas d'oubli du train d'atterrissage par l'élève.
Son comportement en vol fait de lui un bon avion école militaire avec de bonnes facultés formatrices avec cependant un bémol concernant sa motorisation qui pouvait s'avérer un peu faible.
En effet, dans certaines configuration (3 membres d'équipage à bord, piste un peu courte, température et altitude élevée), le décollage pouvait s'avérer risqué voir impossible.



Deux missions principales étaient assignées à cet avion qui comptait plusieurs innovations techniques : la formation initiale des jeunes pilotes de chasse et l'entraînement au tir à la mitrailleuse, aux roquettes et au bombardement léger (C'est à partir de 1956 qu’apparaît la version armée). " L'Alcyon "puisque c'est comme ça qu'il est nommé dans l'armée est déjà un gros avion, un peu plus petit que le " T6 ", mais imposant malgré tout.

profil
Le 125, après une carrière à l'école de l'air et au SEFA, il continuera dans le civil à ravir les amateurs d'aéronautique (carrière typique pour un MS 733).

Armée de l'air



armée de l'air








Outre ces missions principales dans l'armée, il a été utilisé également en école de Navigateur mitrailleur mitrailleur à la DIOM de Caen-Carpiquet (Division d'Instruction des Observateurs et Mitrailleurs de la Base Ecole 720 de Caen). Les militaires affectés a cette unité ont notamment servis en AFN sur les Sikorsky H-34 "Pirate" (c'est à dire équipé d'un canon de 20mm sur le sabord).
L'insigne de la DIOM

Trois mois de stages partagés entre l'instruction militaire, les cours spécifiquement aéronautiques (navigation, météo). L'entraînement, principalement effectué sur des avions, préparait les hommes aux fonctions d'observateurs, navigateurs, cette formation était ouverte aussi bien aux officiers de réserve (qui briguaient le brevet d’observateur) et aux hommes de troupe qui eux devenaient tireurs et sortaient de l’école avec un grade de caporal-chef ou de sergent... C’est plus tard que l’affectation à des unités équipées d’hélicoptères transformèrent ces observateurs en tireurs canons ou mitrailleuses...

hélice Ratier bipale
Les appareils de l'armée de l'air possédaient aussi l'hélice Ratier bipale

Pour voir la liste des formations qui ont utilisées le MS 733 dans l'armée de l'air voir cet excellent site:
Mais il faut en retenir que beaucoup d'avions ont servis en Afrique du nord pour de l'appui feu ou simplement de la formation.Il fut également largement utilisé par l'Ecole de l'Air de Salon-de-Provence. Sa carrière se termina en 1964 (10 ans avant ceux de l'aéronavale), il fut remplacé par le Fouga Magister.

Quelques anciens appareils de l'armée de l'air ont été vendu au Maroc:
Maroc

Après sa carrière militaire, le MS 733 entame une carrière civile cette fois au Service de la Formation Aéroanautique (SFA) pour la formation des pilotes de l'aviation civile. Suite a une demande du SFA, une hélice tripale Hartzell est adaptée en lieu et place de la Ratier bipale qui équipait l'appareil auparavant (pour plus de fiabilité de la commande de pas).
Une autre demande n'a par contre pas aboutie, il s'agit de la remotorisation de l'appareil par un moteur de 350 chevaux qui aurait comblé le manque de puissance au décollage. Cette modification a été abandonnée à cause du vieillissement des cellules qui aurait peut être mal supporté l'ajout de puissance.

A noter qu'il y avait deux types de MS 733 équipant le SEFA, les appareils de série en jaune et les appareils de présérie en orange, ces derniers avaient un profil d'aile un peu différent.

SEFA Saint Yan


Le Ms 733 s'est révélé être un avion sûr puisque en plus de 25 ans de service au SEFA, seuls 2 avions ont été perdus (sur les 60 utilisés). C'est donc plus à cause de sa couleur et des heures passés à transpirer par les jeunes pilotes que l'appareil à hérité du surnom de "péril jaune".
Les derniers morane ont été retirés du SEFA en 1979 soit 28 ans après le 1er vol du prototype.
SEFA
En maintenance à Montpellier


De même, Air France a loué cinq appareils à l'état pour remplacer ses Stampe destinés à assurer la formation de copilote pour les navigateurs et radios. Ils volaient à Cormeille en Vexin.
L'IAAG, le défunt institut amaury de la Grange a également possédé une flotte de MS 733.


Ainsi, pendant 12 ans, l'appareil a servi à la formation des pilotes de l'armée de l'air, et pendant 17 ans dans l'aéronavale  puis pendant 25 ans, il a servi au SEFA. Des milliers de pilotes se sont donc assis à ses commandes, il s'agissait souvent de leur 1er contact  avec un avion, c'est dire s'il a du laisser des souvenirs émouvants à certains. 

Aujourd'hui, quelques uns continuent à voler et de nombreux appareils sont présents dans des musées.





Le MS-733 de Corbas est le C/N 67, il a porté l'immatriculation F-BMMQ, ce qui indique qu'il a appartenu au SEFA (il a très surement volé à Montpellier et/ou Saint Yan). Il a été vendu au domaine en 1979 à Saint Yan. Il a été initialement commandé par l'armée de l'air.

Et si après ça, vous en voulez encore, voici un compte rendu de vol en MS 733 Alcyon par Christian Ravel du GPPA d'Angers (groupement de préservation du patrimoine aéronautique) qui s'appelle maintenant Espace Air Passion depuis peu.

SEFA
A l'arrière plan, on distingue l'immatriculation du 67, F-BMMQ, il s'agit de celui de Corbas vu en 1979 à Saint Yan alors qu'il était en vente aux domaines. Quant au F-BMQJ, 125, 3 ans plus tard, en 1982, il volait encore avec une immatriculation anglaise en meeting, G-SHOW, ça ne s'invente pas !





EALC Corbas
Situation initiale, en avril 2012, il faut bien de l'imagination pour deviner un MS 733...


EALC
Il y a un an, ça commence à bouger, la restauration commence pour de bon

EALC Lyon Corbas
Les ailes refont leur apparition
EALC Lyon Corbas
Fin juin, la dérive, le stabilisateur et la roulette de queue sont remontées.






train d'atterrissage
De même que les train d'atterrissage principaux.



EALC Corbas
Le cockpit se regarni également rapidement.




EALC Lyon Corbas
Un mois plus tard, le 20 juillet 2012, la situation n'a plus rien à voir


EALC Corbas
L'appareil a été mis en croix.

EALC Corbas
Et il repose maintenant sur ses roues!



EALC Corbas
Quand je rentre des USA en Janvier, c'est ainsi que je le trouve, avec sa verrière remontée.
EALC Corbas
L'intérieur a maintenant une très belle apparence, ne manquent plus que les sièges.

EALC Lyon Corbas
Les volets ont également été remontés.
EALC Corbas
Le volet jaune, seule trace de son passage au SEFA.

EALC Corbas
Et le moteur Potez 6D 30 est prêt à être remonté.




EALC Corbas musée Clément Ader
Ce sera fait en mars.

Musée Aviation Corbas
Il manque encore des choses mais en 1 an, l'appareil a quand même bien progressé. Bravo à tout ceux qui ont travaillés dessus !



EALC Corbas
Et la petite dernière prise le 05 mai 2013 qui vous montre l'appareil avec son hélice Hartzell, encore une preuve de son passage au SEFA.







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4 commentaires:

  1. Salut Baptiste

    Sais tu quelles couleurs il va porter, après restauration?

    Bonne journée
    A+

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  2. Bonjour Sébastien,

    Je n'ai pas encore demandé mais si on en reste à l'historiquement exact, il ne peut je pense que porter une déco du SEFA (à cause de son hélice), mais bon, vu le nombre de MS 733 couleur armée de l'air ou marine qui volent avec une hélice tripale, on n'est pas a ça près !

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  3. bonjour :)
    L'IAAG est loin d'être morte ou disparue...

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  4. Bonjour, merci pour le commentaire, j'ai bien sûr confondu avec l'EPAG qui au moment où j'ai écrit l'article avait déposé le bilan avant de renaître sous la forme d'EPAG NG.

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